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6 mois avec le X-Pro 1 − 3ème partie

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Première partie disponible ici - Seconde partie disponible ici

Après avoir brossé un tour “technique” du Fuji X-Pro 1 dans mes 2 précédents articles, qu’en est-il de son utilisation au quotidien? Plus généralement, presqu’un an après son lancement commercial, faut-il toujours craquer pour le X-Pro 1 ou bien choisir son petit frère, le X-E1?

Sur le terrain

Rarement je n’ai pris autant plaisir à photographier qu’avec le X-Pro 1. Cette phrase doit évidemment être mise en contexte avec mon style de photographie. Comme tout hybride, le X-Pro 1 ne se prête pas à la photo d’action / sportive (focales trop courtes, réactivité insuffisante de la détection de contraste). Mais pour le photographie urbaine ou de voyage, le X-Pro 1 est une révélation, un retour aux sources par sa simplicité.

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Le très pratique menu Q, accessible depuis la touche dédiée, à portée de pouce

Dans le désordre, j’apprécie au quotidien:

  • Sa compacité et sa légèreté, qui me permettent d’emporter systématiquement le triple kit, là où j’hésitais longuement lorsque je sortais mon 5D Mark II.
  • La simplicité de mise en oeuvre, grâce aux 3 molettes toujours bien visibles: bague d’ouverture, molettes des vitesses et de compensation d’exposition. Dans les faits, je regarde plus souvent ces molettes que je ne vérifie les réglages dans le viseur, mis à part le couple vitesse / ISO pour m’assurer de la netteté du sujet. Bien entendu, cette simplicité n’est apparente que pour celui qui maîtrise déjà les bases de la photo. Pour un débutant, ce boîtier pourrait se transformer en énigme :)
  • Le menu Q, très bien fait, me permet de changer les réglages extrêmement rapidement. On se déplace avec le pavé directionnel, on change les réglages avec la molette arrière (un de ses rares usages malheureusement). Notamment les styles d’image, le mode DRO (correction des ombres) que j’ai tendance à laisser désactivé, ou encore le choix RAW ou RAW + JPeg. Il est possible d’enregistrer ses propres profils (par exemple, l’un pour le JPeg+RAW N&B, l’autre pour le RAW avec débouchage des ombres etc.), mais on ne peut malheureusement pas les nommer. Un peu de gymnastique mentale donc.
  • Le passage de la visée optique à la visée électronique est transparent, et devient vite un réflex. Je me surprends cependant à utiliser quasi tout le temps la visée électronique, qui me permet de voir en noir et blanc, en cadrage 100%, et de compenser l’exposition “à vue”. Je choisis la visée optique le plus souvent au 18mm, en mode “photoreportage”, ou bien lorsque la plage de mise au point est large. En effet, le cadre de mise au point étant assez large en visée optique, à grande ouverture il m’est arrivé plusieurs fois de faire la mise au point sur un sujet et d’avoir l’arrière plan net à la place!
  • En visée électronique justement, j’apprécie de pouvoir déplacer et redimensionner le collimateur autofocus grâce à la molette arrière. Redoutable pour un portrait bien net sur l’oeil!
  • Détail pratique, le viseur est bien lisible, et sa forme ronde le rend facile à nettoyer. Les fabricants de trous de serrures (réflex) feraient bien d’en prendre de la graine (exception faite de Nikon, maître en la matière sur les D700/D800).

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Figurine de Wayang golek, théâtre de marionnettes indonésien

Plus généralement, le X-Pro 1 permet de photographier en toute discrétion. Sa forme n’attire pas le regard, et son déclencheur est particulièrement discret (plus qu’un réflex, à peine moins qu’un X100 qui atteint des sommets).

L’autofocus, largement débattu sur les différents sites, ne m’entrave pas. Dans 90% des cas, je prends plus de temps à affiner le cadrage avant le déclenchement qu’à faire la mise au points! L’autofocus a bien progressé sur les dernières mises à jour, au point de faire jeu quasi égal avec la concurrence. Dans les cas critiques, j’anticipe la mise au point par l’endroit où va passer mon sujet. Restent malgré tout quelques déchets, lors de prises de vue “sur le vif” (ex: un tramway en approche, on “saute sur l’appareil pour saisir l’instant…”). Un réflex avec un objectif rapide permettrait de diminuer les déchets, sans totalement les éliminer. La progression chez Fuji se fera sur 2 plans:

  • L’intégration de la détection de phase dans le capteur pour les futurs modèles - dont le X100s. La détection de phase permet de savoir où se situe le sujet (plus loin / moins loin) et donc d’éviter l’effet de pompage / hésitation de l’autofocus
  • La motorisation linéaire (et ses variantes comme l’Ultrasonic chez nos amis Canon). Malheureusement, les 3 optiques fixes en sont dépourvues. A ce titre, les hybrides Sony / Olympus sont un poil plus rapide. 

En prenant un peu de recul, l’autofocus est un “non sujet” pour moi: largement assez rapide au quotidien, il suffit de pré-cadrer ou de fermer un peu pour répondre à 98% des situations rencontrées.

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Petite macro rapide au 60mm après la pluie

Parmi les éléments “bien mais pas parfaits”, on citera:

  • Le viseur optique, qui permet de voir les éléments hors champ façon Leica, mais se révèle peu précis avec une couverture de 80%. Dans la pratique, la photo déborde toujours du cadre, et je ne comprends pas que celui-ci ne soit pas plus précis (au moins pour une distance moyenne / à l’infini). 
  • Au chapitre des éléments qui n’ont pas d’incidence sur l’image finale, on remarque que la balance des couleurs est différente entre viseur et écran. Rien de grave, mais j’ai l’impression que l’écran arrière est plus fidèle, et j’aurais apprécié que les 2 écrans soient calibrés / matchés.
  • Le 60mm aurait gagné à être stabilisé, à l’instar du magnifique Canon 100mm f2.8 L IS. Cela dit, cela reste une très belle optique, extrêmement piquée!
  • J’aurais aimé que l’on puisse faire une retouche manuelle du point après l’autofocus, comme c’est le cas sur les optiques USM pro chez Canon. A défaut, il faut passer en mode manuel, et activer l’autofocus à l’aide de la touche AFL, ou tourner la bague de mise au point pour reprendre la main.

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Photo à 6400 ISO sur un mariage. Ca passe!

Enfin, les quelques points négatifs de l’appareil:

  • Le plus sensible pour moi est, de loin, l’autonomie trop limitée. Une journée, mais jamais 2 - et pourtant je ne sollicite pas trop l’écran! Le pire est que la jauge de l’appareil est très peu précise. On passe en quelques minutes d’une batterie en apparence (mi) pleine à une batterie vide. Des batteries de rechange sont donc indispensable, et j’espère que le futur X-Pro 2 progressera sensiblement (batterie plus puissante + composants moins énergivores + jauge fiable à la Stamina - ces 3 éléments doivent absolument être combinés!)
  • Au chapitre des bizareries, les photos prises verticalement n’occupent qu’une portion de l’écran en visionnage… même lorsque l’on zoome sur la photo. Etrange, stupide, déroutant :)

Les images!

Ce n’est un secret pour personne, Fuji a certainement produit le meilleur capteur APS-C du marché, au point qu’il vient quasiment égaler les capteurs full frame en termes de gestion des ISO / dynamique. S’il n’égale pas un 5D Mk III - ni évidemment le rendu propre au capteur 24x36, d’après mon expérience, on est lagement au niveau d’un 5D Mk II… voire même meilleur dès que l’on regarde la qualité des ombres.

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Offrande à la mer, Bali

Les 16Mpixels sont largement suffisants et permettent de faire des grands tirages sans arrière pensée (50x75cm et plus). Bien évidemment, malgré l’absence de filtre passe-bas, on n’également pas totalement le piqué d’un capteur 22MPixels, et encore moins celui du très beau Nikon D800e. Mais qui en a réellement besoin au quotidien? Je trouve le compromis judicieux dans la mesure où il permet d’avoir une excellente montée en ISO (souvenez-vous de l’ambitieux capteur 24MPixels du Sony NEX 7 qui m’avait beaucoup déçu de ce côté là).

Dans la pratique, j’exploite la plage focale complète autorisée par le format RAW, c’est-à-dire de 200 à 6400 ISO. Jusqu’à 3200 ISO, l’image est de très bonne tenue, et l’on mesure les progrès accomplis depuis mon 5D premier du nom, sur lequel il fallait se limiter à 1600 ISO malgré des photosites plus gros. A partir de 3200 ISO, les fins détails commencent à s’estomper dans le bruit, mais les fichiers gardent globalement une bonne tenue. J’apprécie - sur le X-Pro 1 comme sur d’autres appareils - de pouvoir travailler par tiers de valeurs, surtout dans les hauts ISOs où cela permet d’adopter la sensibilité minimale nécessaire (par exemple 2000 ISO ou 4000 ISO, et non directement 3200 ou 6400).

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Coucher de soleil à Lovina, Bali

La dynamique du capteur est globalement bonne, et j’avoue avoir tendance à désactiver la fonction DRO pour 2 raisons:

  • Elle fait monter l’ISO équivalent jusqu’à 800 ISO de base en mode DR400. Pour rappel, la fonction DRO permet de corriger les zones surexposées en sous-exposant à la prise de vue, puis en débouchant les ombres. D’où en apparentce une sensibilité jusqu’à 4 fois plus élevée (DR400) qui correspond à sous-exposer d’autant.
  • De fait, le RAW comme le JPEG sont impactés. Sur le 5D Mark II, j’avais souligné la dégradation potentielle des fichiers, mal documentée par Canon. 

Bref, je suis certainement « vieille école », mais je préfère exposer « à droite » et faire les éventuelles corrections sur du format RAW « vraiment » RAW, en post traitement.

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Marché de nuit, Bali

Les fichiers JPEG sont excellents, au point de pouvoir se passer de post traitement dans pas mal de cas. Cependant, il faut prendre le temps d’apprivoiser les différents rendus Fuji - qui reprennent les noms évocateurs de l’argentique, tel Astia, Provia ou encore Velvia. C’est ici qu’une aide intégrée à l’appareil aurait été pratique, pour décrire le rendu de chaque « preset ». Pour ma part, j’ai switché ces derniers temps sur un noir et blanc contrasté, mais continue de faire du RAW + JPeg car je préfère - encore et toujours - le travail sous Silver Efex (notamment pour choisir la meilleure correction en noir et blanc, plutôt qu’un mélange des couches « standard ».

La prise en charge du format RAW par les logiciels de workflow a été l’objet d’un débat sans fin sur internet, chacun adoptant des positions tranchées. Le format X-trans, propre à Fuji, pose évidemment des challenges aux ingénieurs - pour en tirer partie, il ne suffit pas d’adapter les algorithmes de dématriçage existants. Mis à part Apple qui n’accorde visiblement pas d’attention au format, le capteur du Fuji est aujourd’hui bien supporté par LightRoom et Capture 1.

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Tramway à Lisbonne, JPEG brut de boitier

Un mot sur LightRoom: les pleureuses qui trouvent le dématriçage insuffisant depuis 1 an feraient mieux de prendre des photos, et d’arrêter de regarder les images au pixel près! Heureusement, le rendu était déjà très bon, et la nouvelle version 4.4 RC apporte des améliorations substantielles dans le rendu, qu’il me faut regarder de plus près.

Mon seul souci ici est plutôt la puissance que demande le dématriçage du format X-trans. Subjectivement, j’ai l’impression que les RAW du Fuji X-Pro 1 consomment beaucoup plus de puissance processeur qu’un capteur “classique” 16–22MPixels (type D7000 ou 5D Mk II). Sous LightRoom justement, sur ma machine pourtant puissante (Core i7 quad 2.8GHz, 12Go de RAM), il faut quelques secondes pour ouvrir complètement une image, soit quelque chose d’équivalent aux RAW du D800! J’espère que la version 4.4, en plus d’améliorer le rendu, accélèrera les choses. Stay tuned.

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Portrait en JPEG brut de boîtier...

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... vs RAW converti avec Silver Efex. Bref, pour le noir et blanc au moins, je préfère prendre mon temps pour avoir un N&B "sur mesure" (même si l'exemple ci-dessus n'est peut-être pas le plus flagrant)

Pour (re) conclure

Fuji a réussi un tour de force avec sa série X: revenir aux fondamentaux de la photo, dans des appareils qui ont certes un look rétro, mais sont résolument modernes dans leur conception.

Le Fuji X-Pro 1, en plus d’inaugurer une gamme « hybride » ambitieuse, est appareil qui se « fond dans le décor », et laisse le photographe se concentrer sur son sujet, sans l’intimider. N’est-ce pas le plus beau compliment que l’on peut faire à un appareil?

De l’ergonomie, en large progrès par rapport au X100, aux optiques compactes et piquées (en particulier le magnifique 35mm), en passant par un déclenchement très discret ou encore le poids total qui n’excède pas 1kg avec 3 optiques, tout concourt au plaisir de la photo!

Bien sûr, l’appareil n’est pas sans défauts. La batterie est beaucoup trop juste selon moi, le viseur optique imprécis (80% même à l’infini), et l’autofocus, désormais dans la norme, gagnera encore en réactivité notamment pour les sujets mouvants, grâce à l’adjonction de capteurs de phase et à la motorisations linéaire des optiques. Mais cela n’empêche nullement le X-Pro 1 d’être un succès mérité, et de faire des photos sublimes - il n’y a qu’à regarder les photos issue de la petite communauté, ou encore les photographes pro qui ont succombé au système!

La question finalement, avec l’arrivée du petit X-E1, et de savoir quel appareil choisir. Je ne regrette à aucun moment le X-Pro 1, mais pour ceux dont le budget est plus limité, le X-E1 est une proposition encore plus attractive, avec un viseur 100% électronique mais légèrement plus défini, et un petit flash intégré pour déboucher les ombres… Ca tombe bien, je compte l’essayer prochainement.

J’essaierai de poster plus régulièrement des photos prises avec l’appareil. L’occasion de sortir de la technique pour voyager un peu! Destination l’ouest américain armé du Fuji dans quelques semaines!

Jean-François - DigitLife

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